Congo : transparence des finances publiques, une commission de plus?

Pour répondre aux exigences du Fonds monétaire international (FMI), qui demande aux autorités de mieux gérer l’argent du pays, le Congo-Brazzaville a créé il y a neuf mois une Commission nationale pour la transparence et la responsabilité dans la gestion des finances publiques (CNTR). Mais la société civile congolaise s’interroge sur ses pouvoirs réels.

Veiller à la bonne application du Code de transparence et de responsabilité fiscale, telle est l’une des principales missions assignées à cette commission qui compte onze membres qui ont tous prêté serment.

« Les finances publiques ne peuvent pas être gérées n’importe comment. On les gère selon les normes. Ces normes doivent être respectées. Si elles ne le sont pas, nous le rappelons et nous redressons sur la base d’un rapport que nous adressons aux autorités, notamment au président de la République et au Premier ministre », a expliqué Joseph Mana Fouafoua, son président.

Sous la tutelle du ministre de la Justice

La commission n’a pas le pouvoir de répression. Ses enquêtes sont soumises à l’appréciation du ministre de la Justice qui est sa tutelle. « Nous sommes une institution indépendante. Mais nous n’avons pas le pouvoir de coercition. Il faut savoir que parmi les autorités qui sont destinataires de notre rapport, il y a le ministre de la Justice. C’est à lui de prendre la décision s’il faut, oui ou non, punir. C’est à lui de faire son travail », a argumenté M. Mana Fouafoua.

Membre de la coalition congolaise « Publiez ce que vous payez », Brice Makosso se demande pourquoi cette tutelle revient au ministère de la Justice, qui ne gère pas les deniers publics. « Nous ne comprenons pas pourquoi le gouvernement de la République a mis cette commission sous la tutelle du ministère de la Justice. Je crains que cette commission ne serve à rien. Ce n’est pas le ministère de la Justice qui gère la fiscalité congolaise ou encore les finances. Il fallait la mettre sous la tutelle du ministère des Finances, pour qu’elle travaille effectivement », s’est indigné M. Makosso.

Quid des membres de la commission

La Commission nationale pour la transparence et la responsabilité dans la gestion des finances publiques n’a pas de membre femme. Deux de ses membres ont été désignés par la société civile et deux par la presse. Les autres l’ont été par les responsables des institutions, l’Assemblée nationale ou le Sénat.

Cela remet-il en cause son indépendance ? Le président Joseph Mana Fouafoua répond : « C’est un mode de désignation tout simplement ; cela ne veut pas dire que ces membres représentent ces autorités. Quand on crée une institution, on indique comment les hommes qui doivent la diriger sont choisis. Par rapport à notre travail, ils ne sont pas soumis à l’autorité de ces hauts responsables », s’est-il justifié.

Mise en place depuis neuf mois, la CNTR vient à peine de démarrer ses activités à cause d’un manque de financements.

Congo : la côte d’Ivoire « a tenu ses engagements »

En octobre 2013, le Congo, en état de surliquidité avait accordé un prêt de 100 milliards de Fcfa à la Côte d’Ivoire afin d’assainir ses finances publiques endommagées par la crise postélectorale de 2010-2011.

Une dette aurait été entièrement remboursée. Selon plusieurs sources à Abidjan, la dette de 100 milliards de Fcfa a été intégralement remboursée depuis plusieurs années. La Côte d’Ivoire ne doit pas d’argent au Congo dans le cadre de cette dette, et le Congo n’a rien réclamé à la Côte d’Ivoire dans ce sens.

L’affaire a été relancée il y’a quelques jours dans des fakenews indiquant que « les 100 milliards de Fcfa prêtés en 2013 par le Congo à la Côte d’Ivoire restent à ce jour impayés (…) Depuis de longs mois, Denis Sassou N’guesso (DSN) ayant des doutes sur l’issue du scrutin prochain présidentiel, met la pression sur Ouattara pour obtenir le remboursement ».

Dans l’attente de détails éventuels et d’éléments nouveaux sur le processus, nos interlocuteurs sont formels : la Côte d’Ivoire a tenu ses engagements. Elle a été correcte à l’égard du Congo, et le demeure vis à vis de l’ensemble de ses partenaires.

Le Congo entend passer d’un budget de moyens au budget de programme

La stratégie globale de pilotage des reformes des finances publiques 2020-2029 a été approuvée, le 5 juillet à Brazzaville.

La validation de la nouvelle feuille de route du secteur des finances publiques intervient deux ans après la transposition dans le dispositif national des directives du cadre harmonisé de gestion des finances publiques de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). Le Congo entend poursuivre les efforts de modernisation de son système de gestion publique, afin de le rendre plus adapté aux normes internationales, et de consolider ainsi ses relations avec les partenaires au développement.

C’est dans ce contexte que s’est organisé l’atelier national de validation du rapport diagnostic ayant réuni des cadres du département des Finances, grâce au Projet de réformes intégrées du secteur public(PRISP) que finance la Banque mondiale. Un partenariat censé permettre au gouvernement d’assainir les finances publiques, de sécuriser les deniers publics, de mieux maîtriser la gestion de la dette publique, de promouvoir l’efficience et la transparence, en lien avec le Plan national de développement 2018-2022 et les exigences des partenaires extérieurs.

Selon le ministre délégué en charge du Budget, Ludovic Ngatsé, la stratégie globale de pilotage des reformes des finances publiques 2020-2029 traduit la volonté du gouvernement. « Cette dynamique des reformes, comme vous le savez, traduit bien la volonté du président de la République, chef de l’Etat, son excellence Denis Sassou N’Guesso, qui ne cesse de nous exiger de travailler sans relâche, pour placer la gestion publique au service du mieux-être de la population congolaise. C’est cette logique qui explique notre volonté de doter le pays d’un cadre stratégique de pilotage plus englobant, dépassant le cadre sectoriel limite au seul ministre des Finances, tel que défini en 2017 », a -t- il signifié.

Congo : s’approprier des normes internationales pour mieux contrôler les finances publiques

Des vérificateurs de la Cour des comptes et de discipline budgétaire prennent part, du 4 au 20 décembre à Brazzaville, à une formation sur le sujet.

La formation est une initiative du Projet de réformes intégrées du secteur public (Prisp). Elle pour objectif de renforcer les capacités du personnel des corps de contrôle appelé à effectuer des missions d’audit financier et autres contrôles auprès des entreprises, institutions, établissements et services publics.

« En 2020, la Cour des comptes devra inaugurer la prérogative de certification des comptes publics, une mission qui nécessite des auditeurs mieux outillés, équipés et rompus à la tâche », a déclaré la vice-présidente de la Cour des comptes, Jocelyne Milandou.

« Ce séminaire revêt toute son importance eu égard aux enjeux de l’heure liés à la gestion efficiente des finances publiques, principale exigence de bonne gouvernance de nos Etats. Les normes ISSAI nous apporteront, sans nul doute, la substantifique moelle sur l’encadrement des différents types d’audits afin d’écarter tout amateurisme et toute confusion dans la conduite de ceux-ci », a-t-elle indiqué.

Il faut le rappeler, le 24 septembre au 9 octobre derniers, le Prisp avait financé, toujours au profit des cadres de cette institution, un atelier de perfectionnement sur le système révisé de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires.

Finances publiques : des nouvelles réformes en cours

Des cadres sectoriels réunis, le 4 septembre, à Brazzaville, se sont engagés à enrichir le document.

Le rapport diagnostic du système de gestion des fonds de l’État suggère quelques pistes pour accroître la transparence du domaine.

L’étude dianostique du système de gestion des finances publiques au Congo a été menée par un cabinet d’experts. Le rapport propose de prime à bord de renforcer la transparence, d’accentuer l’efficacité de la gestion publique et d’adopter une approche de performance pour le recours aux outils et techniques de travail plus rénovés d’ici à 2022.

L’un des progrès de ces travaux, à en croire le consultant Rufin Bahana, concerne le passage du budget de moyens au budget-programme. Le modèle proposé est axé sur les résultats et oblige les gestionnaires publics à être plus performants.

Pour Henri Loundou, le directeur de cabinet du ministre des Finances et du budget, le processus de réforme en cours n’est autre que la transposition au niveau national des directives de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, et que ceci devrait améliorer les habitudes de travail des acteurs de la chaîne des dépenses et des recettes.

Il est important pour le pays, a poursuivi le commis de l’État, de disposer d’un cadre logique qui schématise leur stratégie de pilotage nécessaire à coordonner les actions et créer une synergie entre les différentes composantes de la chaîne de la gestion publique. L’élaboration d’un plan stratégique répondrait à cette finalité.

« C’est pour nous un engagement de pouvoir travailler à la réalisation de cet ambitieux chantier, contribuant ainsi au renforcement de la gouvernance publique », a déclaré Henri Loundou, lors de l’ouverture mercredi des travaux de l’atelier de validation du rapport diagnostic.

À noter que la rencontre intervient quelques mois après les ateliers sur le diagnostic organisationnel et fonctionnel limités aux administrations sous tutelle. Celle-ci a voulu s’étendre à d’autres acteurs de la chaîne de gestion des dépenses et recettes, grâce à un appui du projet de réformes intégrées du secteur public.

Finances publiques : les agents des impôts menacent d’entrer en grève

Les travailleurs de la Direction générale des impôts et des domaines (DGID) ont lancé un préavis de grève de sept jours à compter du 21 février jusqu’au 1er mars 2018. L’oseille, encore elle, est essentiellement au cœur du problème.

Dans un document cosigné par les secrétaires généraux de la coordination du collège des syndicats de la DGID et de la Confédération syndicale des travailleurs du Congo (CSTC), les travailleurs réclament le paiement des primes d’incitation, la fameuse oseille (neuf mois) et de rendement (2013, 2014 et 2015).

Les travailleurs soulignent la non-mise en place d’une commission de travail devant regrouper le cabinet du ministre des Finances, la direction générale du Trésor, la DGID et le collège des syndicats des impôts « pour faire le point des rétrocessions des pénalités 2016 et 2017 et la lumière sur les deux milliards 800 millions rétrocédés à la DGID ».

Par ailleurs, les agents des impôts déplorent le refus, par la tutelle et la DGID, de dialoguer avec leurs représentants syndicaux, de même que « la création d’un syndicat parallèle à la DGID pendant la période des négociations visant à affaiblir les efforts de la coordination ».

La moyenne mensuelle des recettes fiscales a tourné autour de cinquante-six milliards de francs CFA en 2017.

Les recettes fiscales occupent une place importante dans les ressources budgétaires de l’État, surtout au moment où le pays traverse une crise économique et financière délicate, due à la chute du prix de baril de pétrole sur le marché mondial.