Congo : Denis Christel Sassou Nguesso mis en examen

Le fils du président congolais a été mis en examen pour blanchiment en décembre, dans ce dossier portant sur le vaste patrimoine de la famille Nguesso dans l’Hexagone.

C’est une nouvelle étape dans l’enquête des « biens mal acquis ». Un fils du président du Congo a été mis en examen en décembre dans ce dossier portant sur le vaste patrimoine en France de la famille Nguesso, a-t-on appris ce vendredi de source proche du dossier, confirmant une information de Challenges.

Denis Christel Sassou Nguesso, 45 ans, a été mis en examen pour blanchiment par le juge d’instruction Dominique Blanc, chargé de la principale enquête dite des « biens mal acquis » qui porte sur des soupçons d’acquisition frauduleuse de patrimoine de familles dirigeantes africaines, selon cette source.

Député d’Oyo (nord), fief de son père Denis Sassou Nguesso qui cumule 36 ans à la tête du Congo, Denis Christel a été jusqu’en 2016 la deuxième personnalité de la puissante Société nationale des pétroles du Congo (SNPC). Dans un rapport rendu public en août dernier, l’ONG britannique Global Witness l’a accusé d’avoir détourné à son profit plus de 50 millions de dollars des fonds publics en 2014.

De nombreuses mises en examen depuis 2017

Denis Christel Sassou Nguesso est le premier membre de la famille à être poursuivi dans ce volet de l’affaire depuis une première série de mises en examen en 2017, notamment pour des faits de recel et blanchiment de détournement de fonds publics. À l’époque, une fille du président et son mari, — Julienne Sassou Guesso et Guy Johnson — avaient été mis en examen en juin 2017, suivis quelques semaines après par deux neveux du président, Wilfrid et Edgar N’Guesso, ainsi que la mère de ce dernier, Catherine Ignanga.

Le changement de juge d’instruction, à la fin de l’été 2017, avait ralenti le rythme des investigations avant un regain d’activité l’an dernier, marqué par de nombreuses auditions chez les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) à Nanterre, selon d’autres sources proches du dossier. Dans cette enquête, le notaire Jean-Michel Normand et une dirigeante de l’agence immobilière AICI, Elisabeth Gandon, ont aussi été mis en examen en décembre dernier, avait dévoilé à l’époque le quotidien Le Monde.

« Escroquerie au jugement »

En février 2016, le président Sassou Nguesso avait contre-attaqué, portant plainte pour « escroquerie au jugement », notamment contre l’ONG Transparency international. « Tant que cette plainte n’aura pas été totalement examinée, il ne sera pas répondu sur le fond de ce dossier potentiellement illégal », a réagi Me Jean-Marie Viala, avocat de la famille Nguesso.

Plusieurs biens immobiliers, dont deux appartements à Paris au nom d’Antoinette Sassou Nguesso, l’épouse du président congolais, ont été confisqués par la justice française. Ouverte en 2009 à Paris après une plainte de trois associations, l’enquête porte également sur le patrimoine de la famille Bongo, à la tête du Gabon. Le volet portant sur la Guinée équatoriale s’est, lui, conclu par le récent procès en appel de Teodoro Obiang Nguema, vice-président du pays, qui attend lundi la décision de la cour d’appel de Paris.

Congo : un numéro vert 1314 pour dénoncer la corruption

Un nouveau numéro de téléphone pour dénoncer les actes de corruption vient d’être lancé par le Ministère congolais des Finances et du Budget.

Ce numéro vert 1314 est exclusivement dédié à la réception des dénonciations d’actes de corruption. Pour les pouvoirs publics, ces dénonciations peuvent renforcer les autres mécanismes déjà mis en place.

Après avoir reçu l’appel et si le cas de corruption est avéré, le dossier est transmis au juge qui devra ensuite se coordonner avec le procureur général pour tenter d’arrêter le suspect en flagrant délit.

Ce numéro de téléphone est une nouveauté au Congo-Brazzaville.

On rappelle que le Congo est classé au bas de l’échelle en 2017 en ce qui concerne le marqueur de perception de la corruption de Transparency International. Notre pays occupe, en effet, le 159e rang sur 177 pays, et dans l’indice Mo Ibrahim de la gouvernance en Afrique, nous sommes classés 42e sur 54 pays.

Les structures anticorruption mises en place par le Congo n’ont pas fourni des résultats escomptés, au bout de plusieurs années d’exercice.

Il est devenu de plus en plus ardu d’obtenir normalement un document administratif ou un service dans les délais normalement impartis. Tout recours à l’administration publique ou privée pour un papier ou une pièce spécifique, voire un service dont la délivrance est censée être régentée, du type passeport, carte d’identité, intervention des forces de sécurité, un poste budgétaire, une facture au Trésor public, nécessite un pot-de-vin.

A quelques exceptions près, la corruption est devenue endémique au Congo-Brazzaville et sévit à toutes les étapes de quelque processus que ce soit, particulièrement lorsque de fortes sommes sont en jeu.

La corruption et ses infractions connexes ou assimilées comme la concussion, le trafic d’influence, la soustraction et le détournement des biens, la gestion frauduleuse, l’enrichissement illicite, le favoritisme, la prise illégale d’intérêt, les abus des biens sociaux et le blanchiment des capitaux constituent un obstacle à l’éradication de la pauvreté et sape la capacité du pays d’atteindre ses objectifs du développement.

Le 31 juillet 2016, le président de la Commission nationale de lutte contre la corruption, la concussion et la fraude, Lamyr Nguelé, a accusé le Parquet de Brazzaville de ne pas engager les poursuites judiciaires contre les tierces sur certains dossiers avérés.

Affaire des biens mal acquis : le juge rejette la demande du Congo d’être admise au dossier du côté des parties civiles

L’Etat congolais avait fait appel de la décision, dans laquelle sont mises en examen la fille, le gendre et le neveu du président congolais, soupçonnés de « blanchiment de détournement de fonds publics ».

Le juge français qui enquête sur l’origine du patrimoine fastueux de plusieurs proches du président congolais Denis Sassou Nguesso a rejeté la demande de la République du Congo d’être admise au dossier du côté des parties civiles.

L’Etat congolais a fait appel de cette décision, rendue en février par le juge d’instruction chargé de l’enquête dite des « biens mal acquis », dans laquelle sont mises en examen la fille, le gendre et le neveu du président congolais, soupçonnés de « blanchiment de détournement de fonds publics ».

Le magistrat instructeur a jugé cette demande irrecevable tout d’abord car la République du Congo n’a fourni « aucune pièce justifiant d’un préjudice » dans cette affaire, selon la décision.

Le juge relève par ailleurs que les avocats du Congo ont « contesté depuis le début cette procédure », qui contient « des éléments mettant en cause directement » le président de ce petit Etat forestier, qu’il dirige depuis 35 ans.

L’avocat du président Nguesso et de plusieurs mis en examen avait d’ailleurs riposté contre ces accusations en déposant en 2016 une plainte pour tentative d’escroquerie au jugement. Celle-ci visait l’ONG anticorruption Transparency International dont la plainte avait, entre autres, déclenché l’ouverture de l’instruction.

« L’Etat congolais n’est pas réductible à la famille Nguesso ; quand il s’agit de faire des affaires avec ce pays, on sait faire la distinction », a ironisé l’avocat en France du Congo Me Antoine Vey.

« On dénie à l’Etat du Congo le droit d’agir dans une affaire qui le concerne », s’étonne-t-il.

« Comment déclarer recevable comme victime un Etat qui dénie les faits commis sur son sol alors que le coeur du détournement a lieu en son sein ? », a réagi pour sa part l’avocat de Transparency International, William Bourdon.

Depuis 2010, des magistrats financiers parisiens tentent de déterminer si les fortunes de trois familles présidentielles, celles de Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzaville), Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) et feu Omar Bongo (Gabon), ont pu être bâties en France grâce à des deniers publics détournés de ces pays.

La justice a déjà saisi plusieurs propriétés du clan Sassou Nguesso ainsi qu’une dizaine de voitures de luxe. L’hôtel particulier avec sept pièces et piscine intérieure à Neuilly-sur-Seine (région parisienne), acquis par Julienne Sassou Guesso, fille du président, et son mari Guy Johnson, avait été saisi à titre conservatoire.

La République du Gabon a, pour sa part, été admise comme partie civile dans ce dossier.

Fonction publique : le faux règne en maitre

Des Fonctionnaires fictifs par-ci, des créanciers fictifs par-là, les injonctions du FMI contre la corruption et pour la transparence au gouvernement de Brazzaville en quête d’un programme de stabilisation budgétaire créait des surprises.

Calixte Nganongo, la ministre des finances congolaise découvre l’ampleur du désastre entre les fonctionnaires et créanciers fictifs et par à la chasse. « Certains s’accordent à contourner toutes les mesures prises ; nous attendons l’adoption des réformes pour faire la chasse aux sorcières. Personnellement, je serai intraitable vis-à-vis des fraudeurs ». a-t-il déclaré. Il saisit la justice afin de traquer ces créanciers fictifs : « On a atteint la caricature des caricatures au Congo-Brazzaville, quand on s’est rendu compte que des personnes issues du gouvernement avaient créé un fonds vautour pour racheter des créances, attaquer l’Etat congolais et faire une plus-value !  » Avait-il déclaré à La Libre Belgique, le 06 Mars 2008. Les responsables de ce faux fonds vautour n’ont jamais été inquiétés.

Des fonctionnaires fictifs, des officiers fictifs, des marchés de l’Etat fictifs se comptent par dizaine. Le phénomène de la corruption et de la fraude est pourtant légion au Congo Brazzaville. De la présidence de la République où Firmin Ayessa fut directeur de cabinet au domaine présidentiel où Edgar Nguesso est le patron à la fonction publique en passant par l’armée, aucun secteur n’est épargné». Chacun a ses fonctionnaires fictifs. Pacifique Issoïbeka, ancien ministre des Finances, avait indiqué que 70 % des marchés de l’Etat étaient bidons. « Je viens d’apprendre à la faveur des résultats de la première étape au niveau de l’audit de la dette intérieure que 50% des créanciers ne viennent plus réclamer leurs fonds. Cela signifie que l’Etat avait affaire à des créances fictives  », a déclaré Calixte Nganongo.

L’on se demande donc si le ministre n’avait jamais eu vent de la sonnette d’alerte tirée par son prédécesseur Pacifique Issoïbeka. L’administration brazzavilloise regorge d’agents fictifs percevant des doubles, triple ou quadruple salaires. « Wamba Sassou aurait 25 salaires fictifs qui lui rapportent 30 millions chaque mois » a titré Sacer, journal en ligne de ce 23 novembre 2018. Sacer est souvent au parfum quant aux pratiques caricaturales de la tribu-classe d’Oyo. Les experts du FMI en mission à Brazzaville ne cessent d’insister sur la poursuite de la lutte contre la corruption et la fraude.

Le Congo-Brazzaville est classé au bas de l’échelle en 2017 en ce qui concerne le marqueur de perception de la corruption de Transparency International. Le pays  occupe le 159ième  rang sur 177 pays, et dans l’indice Mo Ibrahim de la gouvernance en Afrique, le petit pays pétrolier d’Afrique Centrale est classé 42ième  sur 54 pays.